Deya et Sophie sont deux ados écorchées par la vie. Des parents absents ou indifférents, voire les deux, leur ont fait prendre conscience de leur solitude dans le monde. Leur rencontre, un jour de rentrée scolaire dans un lycée parisien
va sceller une amitié profonde, exclusive. Presque en autarcie. Elles seront surnommées "le Bloc monolithique" par leurs professeurs. Mais, et on l'apprend dès les premières lignes de ce roman étonnant, une rupture sans appel mettra fin à cette idylle. Huit ans plus tard, Deya, fille de bourgeois parisiens un peu bizarres, décandents, rappellera Sophie issue quant à elle d'un milieu provincial catholique très rigide. Leurs retrouvailles seront à l'image de leur relation: faites de sous-entendus, d'ambiguités, jusqu'à la folie.
Comment vous parler de ce livre sans déflorer toute l'histoire? Difficile. J'espère pas impossible! Essayons donc.
Narratrice de roman, Sophie n'a jamais été aimée par ses parents, des êtres froids, indifférents à sa présence. Qui n'ont même pas la bonne idée de former un couple soudé par autre chose que le devoir catholique. Le jour où elle rencontre Deya, Sophie voit ce qu'elle n'a jamais été, et ce qu'elle n'a jamais eu: une personne remarquable et l'amitié/l'intérêt d'un autre être humain. Deya sera sa bouée, son bourreau, son rempart contre le monde. Son seul et unique intérêt dans la vie.
Nous découvrons petit à petit, par épisodes du passé et du présent intercalés, l'histoire de ce duo improbable, qui, après ces retrouvailles, partira en Afrique à la recherche d'Ariane mère instable de Deya, dont on est sans nouvelles depuis plus de 13 ans. Un voyage qui mènera les deux personnages de ce roman aux frontières de leur relation. A la vérité. Vérité de leur histoire, vérité sur elles-mêmes. Vérité que la narratrice refusera jusqu'au bout, ou presque, de reconnaître.
La plume de Marine Bramly est étonnante de justesse, malgré sa crudité parfois, qui peut surprendre mais dont on saisit vraiment tout le sens à la fin du roman. L'intrigue se tient diablement bien, le lecteur est porté, emporté, subjugué et horrifié à la fois par cette histoire. La frontière entre l'amour et la haine n'aura jamais été aussi floue. L'auteure nous emmène dans le dédale des émotions réprimées ou hurlées, dans la relation fondée sur le besoin viscéral d'appartenance et de reconnaissance. Une oeuvre prenante, captivante, pétrifiante. Comme disait Sartre, "l'enfer, c'est les autres". A juste titre ici.