L'envers de l'espoir - Mechtild Borrmann

Hiver 2010. Habitant dans la zone d'exclusion autour de la centrale de Tchernobyl, Valentina Chtchoukina écrit ses souvenirs dans un petit carnet, espérant le transmettre à sa fille Katerina, dont elle est sans nouvelles depuis son départ pour l'Allemagne avec son amie Olena, soi-disant pour travailler afin de pouvoir payer des études à l'université.

Matthias Lessmann, éleveur de moutons habitant un village entre Düsseldorf et la frontière néerlandaise, porte secours un peu malgré lui à une jeune femme, Tania, manifestement en fuite, seulement habillée d'une nuisette en plein hiver donc.

Leonid Kyjan, policier de la milice de Kiev suspendu, enquête sur la disparition de Katerina et part en Allemagne, sans bien sûr l'assentiment de sa hiérarchie.

Trois narrateurs pour une histoire terrible et qui semble malheureusement banale du trafic d'être humains et de la corruption. Mechtild Borrmann, autrice allemande que je découvre avec ce titre, a écrit une dizaine d'ouvrages, dont seulement quatre ont été traduits en français. L'envers de l'espoir est un roman qui nous parle d'un pays, l'Ukraine, et d'un  peuple qui tente tant bien que mal de s'en sortir et pour qui l'espoir semble être le chemin le plus direct vers la tragédie.

A travers le récit de Valentina, nous découvrons "l'envers de l'espoir" sous le communisme et le stalinisme : Holodomor, déportation en Allemagne de sa mère pendant la guerre d'abord dans une usine, puis dans un bordel, et bien sûr tragédie de Tchernobyl. Infirmière, elle vivait avec son mari à Pripyat, ville ultra moderne créée de toutes pièces pour les travailleurs de la centrale de Tchernobyl et leurs familles. Là-bas, il y avait tout ce que l'on ne trouve pas ailleurs dans le pays, en abondance. Dans son récit pour sa fille, elle décrit comment tous les espoirs ont été trahis sur l'autel de l'idéologie et du pouvoir.

Avec la jeune fille sauvée par Matthias Lessman et Leonid nous découvrons les espoirs déçus de l'indépendance et du libéralisme, confisqués par les oligarques, les espoirs déçus de la révolution Orange en 2003 où les nouveaux venus au pouvoir se révélèrent aussi corrompus que leurs prédécesseurs.

L'envers de l'espoir m'a captivée de bout en bout, pourtant l'écriture de Mechtild Borrmann n'a rien d'extraordinaire, mais il est poignant de suivre les trajectoires de ses personnages, leurs espoirs et leurs désillusions, leur quête d'un bonheur qui semble fugace et payé à un prix si exorbitant... On s'attache à Valentina, Leonid, Matthias et Tania. J'ai dévoré ce roman qui pourrait être terriblement pessimiste mais qui laisse un peu de place à l'espoir. Une belle découverte. Je relirai assurément Borrmann.

Comments

[je lis je blogue]

Je ne connais pas l'autrice de ce roman. En revanche chez lu plusieurs ouvrages sur Tchernobyl (dont le livre de Svetlana Alexievitch qui m'avait marquée) et sur l'Holodomor (dans une BD d'Igor si je me souviens bien)

[Anne]

C'est une autrice que je veux découvrir aussi, je lui ferai bientôt place, j'espère (ah le temps et ces piles à lire envahissantes...)

[Aifelle]

Le thème m'intéresse et j'avais aimé "le violoniste" de cette autrice. Je note.