Je sais que certains piaffaient: "elle dit qu'elle est de retour, mais elle écrit rien!"...
Me voilà donc, avec, je vous l'accorde un jeu de mot assez moyen. Mais bon.
En même temps, des jeux de mots sur le Japon et/ou les japonais je n'en connais pas des masses! Tout ça pour vous entretenir de mes deux dernières lectures. L'âge des méchancetés de Fumio Niwa, et Le cercle de famille de Kojima Nobuo.
L'âge des méchancetés nous évoque, en 100 pages, la fin de vie d'une grand-mère japonaise (j'en entend un qui ricane...) dont personne ne veut plus. A tort, ou à raison. En effet, elle a la facheuse habitude de dormir le jour, et de réveiller régulièrement la maisonnée de sa petite fille chez qui elle habite la nuit. En outre, elle ne cesse de chiper vaisselle, bibelots et autres objets de la famille. Elle est finalement envoyée à la campagne, chez sa deuxième petite fille. Ce livre est à la fois cocasse,
certains épisodes donnent en effet à rire, mais en même temps poignant car il évoque la notion de devoir envers les aînés. Et l'on sait à quel point le devoir est une chose importante pour le peuple japonais. Et cette pauvre vieille, dont personne ne veut, ne peut que se venger en volant, déchirant les tissus, etc etc. L'auteur nous entretiens longuement des références morales des japonais en matière de devoir vis-à-vis des aînés, et les confronte au Japon de l'après guerre, où le "chacun pour soi et Dieu pour tous" prend le pas sur les sacro-saintes obligations ancestrales. Ce livre a le mérite de nous faire réfléchir sur la notion de vieillesse (quelle vie a-t-on quand on dépend totalement des autres, a fortiori quand ces derniers ne cherchent qu'à se débarrasser de vous!), de responsabilité familiale et de don de soi. A l'heure où l'on nous parle de solidarité intergénérationelle et de tolérance, ce petit livre, au style typiquement japonais, offre une réflexion bien venue, pleine de "méchanceté". D'ailleurs, le titre est d'une grand ironie (du moins en français), car si tout le monde dénonce la grand mère, comme une personne méchante, il s'avère rapidement que la jeunesse n'a rien à lui envier en terme de "méchantise"...
Le cercle de famille quant à lui évoque également le japons de l'après guerre. Toujours sur le thème de la famille, des rapports entre les individus qui la composent, l'auteur nous fait entrer dans l'intimité, mais toujours avec beaucoup de pudeur (typiquement japonaise?), de la famille Miwa. En fait, c'est surtout le couple que forment Tokiko et Shunsuke. Lui est traducteur (anglais/japonais), elle femme au foyer. Il apprend par leur femme de ménage inéfficace qu'elle l'a trompé. S'ensuit la rancoeur, les accusations, la réconciliation, la confrontation avec l'amant américain qui avait été l'hôte de la famille. Puis, elle est atteinte d'un cancer du sein qui lui sera fatal. Tout au long des pages, nous suivons les
reflexions du mari sur ses rapports avec sa femme, l'incompréhension qui caractérise leur couple, tant sur les choses de la maison que sur leurs relations intimes. Et comme symbole de leur union, la nouvelle maison, qu'elle a absolument voulu construire sur le modèle américain. Cette maison qui est, de l'avis de tous, invivable: des fuites partout, une climatisation qui ne fonctionne pas, une isolation phonique désastreuse etc etc. Comme la maison, ce couple prend l'eau de toutes parts. A l'instar de toute la population japonaise confrontée au mode de vie américain, des forces contraires sont à l'oeuvre, et finiront par ronger l'ensemble de l'édifice.
La coïncidence aura donc fait que j'ai lu deux oeuvres japonaises de l'après guerre qui traduisent toute la confusion d'un pays soumis à un autre, aux moeurs si différentes, et qui hésite entre ses traditions et l'attrait de nouveautés venues d'ailleurs.
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