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Je découvrais avec ce titre un brin provocateur l'auteur Jean-Hugues Oppel. Comme l'indique la couverture de polar, nous sommes dans le monde des mercenaires. Dans ce court roman, nous suivons sur quelques jours (la chronologie est assez floue) une intrigue qui se joue sur trois continents : Europe, Afrique, Amérique du Nord, et encore, c'est un peu restrictif. 

Nous sommes dans le monde de l'espionnage et des opérations spéciales, qu'elles soient secrètes ou guerres d'agression et d'annihilation déguisées en "sauvetage" de populations soit disant opprimées. En Afrique, nous côtoyons (brièvement heureusement) des mercenaires de l'Africa Corps (nouveau nom de la milice Wagner) ainsi que leurs supplétifs locaux, peu avares de leur énergie quand il s'agit pour les premiers de piller les ressources du pays, pour les seconds de jouer de la machette - pardon du coupe-coupe. Et quand ils tombent sur des Occidentaux, la machine à cash promet d'être encore plus généreuse. Mais ces Occidentaux ne sont pas n'importe qui, et c'est là que les "services" s'en mêlent. Le lecteur est donc catapulté à Paris.  

Dans ce texte au style pêchu, sans concessions, Jean-Hugues Oppel décortique les ressorts du chaos actuel : les massacres et le pillage de l'Afrique (avec compromission de ses élites, toujours promptes à crier à la colonisation pour détourner les regards de leurs propres turpitudes), l'incompétence (ou l'aveuglement) des services (ici français) face à l'agressivité russe qu'elle œuvre en Europe ou en Afrique, les manipulations de cours de métaux rares tels que le coltan, le lithium et autres, ou encore les relations "je te tiens, tu me tiens" entre les différents services secrets, les enjeux posés par les milliardaires etc. 

Le constat est implacable, précis, extrêmement documenté. Oppel tient son sujet (et son lecteur) dans le creux de la main... et le laisse en plan. C'est en tout cas la sensation que j'ai eue en finissant le roman. En tournant la dernière page je me suis un peu sentie abandonnée : quoi? on s'arrête là?? La construction est très cinématographique, on passe d'un chapitre/un lieu à un autre, comme dans les films d'actions, de ce point de vue-là ça fonctionne. Pour en avoir discuté avec l'auteur après la table ronde (au Festival de Lisle-sur-Tarn, j'animais une table ronde avec Sophie Loubière, Jérôme Leroy et donc Oppel), il m'a expliqué que le texte était court pour coller à la nouvelle collection de l'éditeur, La manufacture de livres, des oeuvres courtes, percutantes...et à un prix abordable. 

Il faut plus prendre Envahir la Pologne comme une sorte de pamphlet, très bien écrit et documenté, que comme un roman. Un texte qui sert à déciller les yeux de ceux qui croient encore que certains dirigeants veulent la paix (suivez mon regard), ou que nous sommes plus moraux que d'autres. 

"Les Occidentaux avides comme les miliciens opportunistes n'ont aucun mérite à dominer les populations locales de l'intérieur du continent noir, perdues disloquées égarées quelque part entre la tradition tribale, les arcanes du monde moderne, mais surtout les conséquences d'une décolonisation bâclée et l'envie de pouvoir absolu des nouvelles élites corrompues"

"L'influence des nervis nostalgiques du IIIème Reich est bien plus préoccupante que les feux de poubelles allumés par de jeunes crétins incapables de distinguer les défauts d'une social-démocratie imparfaite de la menace des effets nocifs d'une dictature réussie".

Dérangeant, édifiant, porté par une plume qui se régale mais laissant comme un goût d'inachevé, Envahir la Pologne ne laisse pas indifférent. Son style ayant piqué ma curiosité, je pense relire Oppel, il m'a d'ailleurs indiqué que le premier tome d'une trilogie allait bientôt sortir...

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