Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Le grand incident - Zelba

Cet album de Zelba était signalé dans le Telerama de la rentrée littéraire de septembre dernier, et devant l'enthousiasme de l'article, et le sujet, j'avais demandé à ma bibliothèque de l'acheter. Il vient d'arriver dans les bacs, et je l'ai donc enfin lu.

Le grand incident se passe au Louvre. Teresa, femme de ménage depuis 30 ans discute avec ses "copines", les statues de nus féminins, ainsi que les femmes nues dans les peintures. Celles-ci en ont marre d'être sexualisées, tripotées par des ados lubriques et pervers (adeptes des "upskirts", c'est-à-dire des photos prises sous les jupes de femmes à leur insu, par exemple dans les escaliers), considérées uniquement comme des objets sexuels etc.

Teresa tente de plaider leur cause auprès de la direction du musée. Un direction bicéphale, deux faux jumeaux, Charline et Charles, l'un et l'autre échangeant leur rôle (ainsi que perruque et moustache) suivant les obligations. Mais Charles refuse d'entendre ses idées, la traite de folle et la licencie sur le champ. Les statues disparaissent, les nues en peinture également. Exit les Trois grâces, Psychée, la Madeleine de Marie-Guillemine Benoist, ou encore Suzanne.

Branle-bas de combat, sous l'excuse fumeuse d'un problème de moisissure le Louvre ferme; Des experts de la restauration tentent de faire revenir les femmes auto-invisibilisées. Rien n'y fait. Seul recours: Teresa, qui parvient à faire accepter la demande des femmes. Les hommes, au sein du Louvre, devront désormais être totalement nus, visiteurs, comme employés.

Le grand incident inverse les rôle, les regards, et montre à quel point, dans l'art, notamment à partir du 15ème/16ème siècles, le nu féminin devient très sexualisé. Les femmes étant représentées soit humiliées, soit soumises, mais toujours le nu féminin est un nu érotique. Pour un regard exclusivement masculin, bourgeois et mûr. Alors que les nus masculins sont synonymes de force, de courage, les femmes sont objectifiées.

Zelba a su manier l'humour, le loufoque et le fantastique pour parler de ce thème très important, d'autant plus que le nu est un des thèmes majeurs de l'art depuis des siècles. J'ai beaucoup aimé son traitement du sujet, la façon dont elle explique le lien regard/regardé, comment certains thèmes ont été dévoyés. Par exemple Suzanne et les Vieillards, qui est une histoire sur la lutte entre le Bien et le Mal, n'a plus été vu à partir d'une époque que du point de vue de l'Homme voyeur et lubrique. Alors que les vieillards finissent lapidés et Suzanne sauvée, jamais on ne montre cela, on ne montre que Suzanne sortant du bain, sous le regard pervers de ces hommes, pire, elle est même parfois dépeinte comme une courtisane. Terrible inversion de la culpabilité: comme toute femme violée, elle l'a bien un peu "cherché"...

Le grand incident m'a totalement emballée! A lire et mettre entre toutes les mains, très tôt, pour sensibiliser au sujet!

Publié par les excellentes éditions Futuropolis en coédition avec Le Louvre.

De l'autrice j'avais beaucoup aimé Dans le même bateau.

 

Tag(s) : #coups de coeur, #Ma bibliothèque, #BD, #Histoires de femmes
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :