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Un homme (Noir) venu de Chicago est retrouvé dans un bayou de l'est du Texas. Deux jours plus tard, dans le même bayou, une jeune femme (Blanche) est elle aussi retrouvée morte. Le Ranger (Noir) Darren Mathews va mener l'enquête, tant bien que mal, dans ce coin où le suprémacisme Blanc fait recette.
Par un curieux coup du sort, ce livre partage avec ma précédente lecture (Skiatook Lake de Jubert et Séverac) un thème commun: comment faire partie d'une minorité (bien sûr méprisée, violentée etc) et être Américain?
Dans Bluebird, Bluebird, Attica Locke, que je lisais pour la première fois, propose un roman fort sur la racisme, l'appartenance, la violence et les rapports dominants/dominés. Plume imagée et sensorielle, Locke n'épargne aucun de ses personnages Blancs comme Noirs, leurs ambiguïtés, leurs faiblesses. Surtout, elle explore, elle fouille les profondeurs fangeuses des relations Blanc/Noirs.
Sur plusieurs générations, elle nous rappelle combien les frontières que certains voudraient imperméables sont poreuses. Elle retranscris l'attachement viscéral de familles Noires pour leur terre, propriétaires d'un petit arpent ou de bien plus en plein cœur de la Bible Belt où les évangélistes et autres agités du bénitier sont majoritaires. Leurs terres, dont elles ne se laisseraient chassez à aucun prix.
Dans ce Texas proche de la Louisiane qu'elle décrit avec beaucoup de précision (et d'amour), Attica Locke nous plonge dans un huis clos à ciel ouvert. Odeur de terre et de friture d'okras, chaleur intense et clapotis du bayou. Dans cet environnement, son héros, Darren Mathews, seul Noir de son unité de Rangers, suspendu suite à une affaire de meurtre, proche du divorce et porté sur l'alcool se sent animé d'une mission. Heureusement, on n'a pas droit à de grosses beuveries comme j'ai pu en lire il y a des années et qui m'avaient vaccinée (comprenez écœurée) des flics alcoolos. Mathews se débat avec sa propre histoire, qui résonne avec l'enquête sur certains points. A travers lui, à travers tous ses personnages, Attica Locke nous parle de destinées, de choix de conscience...et de leurs conséquences.
Bluebird, Bluebird est un roman noir passionnant, impeccablement écrit, qui me donne envie d'en lire plus d'Attica Locke.
Traduit de l’américain par Anne Rabinovitch