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C'est Mrs Figg qui a récemment parlé de ce roman (Loin de vous ce printemps, pour l'édition française) que la Lady du "whodunnit" a commis sous le pseudonyme de Mary Westmacott et publié pour la première fois en 1944.
Le personnage central de ce roman, Joan Scudamore, est partie en catastrophe rejoindre sa fille Barbara à Bagdad. Cette dernière y réside avec son mari et leur bébé Mopsy. Sur le retour, Joan se retrouve coincée faute de train dans une gare dans le désert, non loin de la frontière turque. Ces quelques jours seule (hormis le responsable/cuisinier Indien et son jeune commis Arabe) sans rien à lire, rien pour occuper ses mains, vont être l'occasion pour Joan, bien malgré elle, de réfléchir à sa vie. Et cette femme suffisante, si sûre d'elle de ses décisions, va petit à petit se rendre compte que ce qu'elle tenait pour acquis n'était peut-être qu'une illusion.
Je dois dire que j'ai été passionnée par cette lecture, le style parfait de Dame Agatha. Et pourtant, cette Joan est une véritable tête à claques, c'est le profil typique de l'épouse du notable de province tellement suffisante, qui prend en pitié Blanche, ancienne amie de l'école qu'elle croise par hasard au tout début du voyage. Blanche qu'elle trouve si vieillie, mal habillée, défraîchie. Alors qu'elle même reste impeccable. Blanche qu'elle regarde de haut, qu'elle prend en pitié. Mais par quelques petites réflexions, Blanche laisse entendre des choses qui ne sont pas pour plaire à Joan, sur sa vie, ses choix, celle de ses enfants. Joan qui se réjouit d'avoir fait des choix raisonnables, alors que Blanche n'a fait que suivre ses impulsions romantiques, mariée 3 fois, sans la sécurité désirable.
Ses principes petit bourgeois de province, toujours plus préoccupée par le qu'en dira-t-on et son propre bien-être, ont eu un impact délétère sur la vie de son mari et de ses enfants. Au fil de ses balades, Joan prend conscience de l'illusion de sa vie, de ce que son auto-satisfaction lui a fait ignorer pendant toutes ces années. Toute l'habileté d'Agatha Christie réside dans la progressivité de la prise de consciente, dans les situations où le lecteur constate à quel point Joan entend ce qu'elle veut bien entendre, voit ce qu'elle veut bien voir etc.
Absent in the spring est un roman psychologique de très grande qualité sur une personnalité à priori détestable mais pour laquelle on se laisse aller à compatir. (Même si j'avoue ne pas avoir bien compris le retournement à la fin) A. Christie démontre à quel point on peut passer à côté de sa vie si on n'est pas à l'écoute des autres, c'est-à-dire de ces personnes qui nous sont chères. La capacité à s'aveugler volontairement sur des situations, sur nos propres actions pour ne pas reconnaître nos lacunes, nos égoïsmes, nos mesquineries.
Un roman remarquable de finesse psychologique, qui a été un coup de coeur pour moi. Clairement.
