La guerre à peine commencée, et c'est un obus qui arrache à Adrien une partie de son visage. Plus de palais, plus de machoire supérieure. Douleur, horreur, opérations multiples. La vie s'arrête-t-elle là pour Adrien, officier dans le génie, ingénieur des Arts et Métiers ? La vie comme elle était avant, bien sûr. Il sera désormais une "gueule cassée". Mais comme il le dit lui même "Je n'ai pas eu le courage de me suicider. J'ai eu le courage de ne pas me suicider". Tout est dit.
Pendant cinq ans, Adrien, avec bien d'autres, séjournera à l'hôpital du Val de Grâce. Il nouera des amitiés fortes avec deux autres mutilés de la face.
Marc Dugain, dont c'était le premier roman, m'avait complètement convaincue avec La malédiction d'Edgar et L'insomnie des étoiles. Avec La chambre des officiers, une fois encore, même si c'est de manière différente, j'ai lu avec beaucoup de plaisir les histoires de personnages attachants. Pourtant, le roman est très court, et du coup, on pourrait avoir l'impression que Dugain ne fait qu'effleurer le sujet. Mais c'est sans compter sur sa plume délicate, qui d'une phrase résume les angoisses, l'horreur, l'espoir, la désillusion ou encore l'absurdité abyssale de la guerre, des attaques dignes des pires boucheries.
Dans ces formules qui font mouche, qui vous tordent les tripes ou vous tirent un sourire, on sent le talent de Dugain. Talent qui fera le succès de ses livres ultérieurs. Sur le fil du rasoir, ne tombant jamais dans le piège des descriptions gore et de la surenchère larmoyante. Il reste très pudique, ses personnages luttent pour garder une certaine dignité malgré la douleur. Mais, surtout, La chambre des officiers est un très bel hymne à la vie, dédié au grand père de l'auteur, gueule cassée lui-même.
La chambre des officiers a été magnifiquement adapté (assez librement d'ailleurs) au cinéma par Eric Caravaca
Lecture dans le cadre de nos club toulousain dont le thème était La guerre de 14. Sur le sujet je ne saurais trop vous recommander Ceux de 14 de Maurice Genevoix. Superbe.