Inishowen c'est à la fois le lieu d'un début et d'une fin. D'une naissance et d'une mort.
Dans ce livre magnifique, Joe O'Connor, un des grands de la littérature irlandaise contemporaine, nous fait partager le destin de deux personnages au bord du gouffre. Ellen, new-yorkaise, atteinte d'un cancer du pancréas qui ne lui laisse qu'une année à vivre part, une fois de plus, sans rien dire à personne (son mari et ses deux enfants notamment) en Irlande pour y retrouver ses origines, et surtout sa mère biologique. Martin, flic de Dublin, dur à cuire, mais lui aussi au bout du rouleau, divorcé et traqué par ses supérieurs et la mafia locale, rencontre Ellen par hasard. Ils iront ensemble à Inishowen.
En une dizaine de jours, ils vont voyager au propre comme au figuré. Si les mensonges sont nombreux, Ellen et Martin découvrent petit à petit leurs vérités. Si O'Connor ne nous épargne rien des turpitudes et des défauts de ses personnages, il se montre également d'une grande compassion à leur égard. Les dialogues sont partulièrement épicés parfois, durs et sans concession souvent. Personne n'est épargné par la plume d'O'Connor.
Au-delà de cette rencontre entre deux personnages terriblement blessés par la vie, l'auteur nous brosse en toile de fonds le portrait d'une Irlande encore aux proies aux Troubles. On entr'aperçoit les difficultés pour les policiers dublinois de traquer les militants pour l'union de toute l'île. Un épisode du livre évoque également les deux visions qui peuvent s'affronter: celle de descendants irlandais n'habitant plus sur l'île verte, comme Ellen, qui sont à la limite, voire même au-delà, de l'agressivité avec les policiers en Ulster, et celle des Irlandais, comme Martin, qui ne voient pas du tout le problème de la même façon. Enfin, O'Connor évoque l'Irlande "profonde", croyante et intolérante parfois, séparant les amants et abandonnant les filles-mères à leur triste sort dans les instituts de Marie-Madeleine.
Je vous conseille vivement ce livre, qui évoque la vie et la mort, l'amour et le pardon. Une très belle écriture, qui n'épargne ni les personnages, ni le lecteur.
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