Commençons d'ores et déjà ce billet par énoncer un principe de base pour moi : faire la différence entre le sujet et le film. Le sujet ici est connu: un homme, Solomon Northup, Noir, vivant à Saratoga, près de New York dans les années 1840. Noir et libre, musicien, marié et père de deux enfants. Il est enlevé pour être vendu comme esclave dans le Sud. 12 ans où il n'est plus que du bétail. Moins que du bétail. La propriété de ses "maîtres", bon à trimer seulement. Dire que ce qui lui arrive, et plus largement dire que l'esclavagisme est ignoble, immoral, atroce (on pourrait en rajouter dans les qualificatifs et les superlatifs)... c'est enfoncer des portes ouvertes. On ne peut qu'être révolté bien sûr à l'image de ces hommes, femmes et enfants, battus, mutilés, humiliés, dégradés.
Malheureusement, cela ne fait pas de 12 years a slave un bon film, de mon point de vue. Extrêmement académique dans sa forme, il appuie et appuie encore sur les détails abominables. De longs plans qui n'apportent rien de plus. Comme le plan sur le savon, après qu'une esclave a été sauvagement fouettée parce qu'elle avait osé, sur son jour de repos, aller sur la propriété voisine chercher du savon pour se laver. A l'instar de ce plan, le réalisateur insiste tout le long du film, en rajoute pour être bien sûr que le spectateur a bien compris toute l'absurdité, l'injustice et l'ignominie de la chose.
C'est lassant. C'est également très énervant de s'ennuyer autant devant un film qui avait tout pour me passionner du début à la fin. Pourtant je suis loin d'être une insensible, un coeur de pierre. Plutôt le contraire d'ailleurs.
J'ai l'impression que Steve McQueen, Noir lui-même, a tellement voulu montrer l'horreur de l'esclavagisme, qu'il en a fait des tonnes. Sur le même thème, Django unchained, avec toute la folie de Tarantino, est d'un niveau cinématographique très supérieur à mon sens. Et il n'épargne pas au spectateur, bien au contraire, les scènes abominables et la barbarie des Blancs envers les Noirs. Le casting quant à lui est excellent (sauf Brad Pitt qui anonne ses dialogues et fait la moue), Chiwetel Ejiofor (Solomon) est très bon, sobre, Lupita Nyongo ou encore Michael Fassbender (même si je trouve qu'il en fait parfois un peu trop).
C'est donc très déçue que je suis ressortie du cinéma. Et je suis probablement une des rares à avoir cet avis. Mais aussi terrible que soit l'histoire de cet homme, Solomon Northup, cela ne fait pas, pour moi, de 12 years a slave un bon film. De la même manière que certains romans/films sur la Shoah sont de mauvais romans/films. Je fais la différence entre le sujet et l'oeuvre artistique.
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