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Entendu sur France Inter dans l'émission de Sonia Devillers, L'invité de 9h10, Igort est l'auteur de ces Cahiers ukrainiens - Journal d'une invasion. De son vrai nom Igor Tuveri, né en Italie, l'auteur a vécu en Ukraine et a d'ailleurs épousé une Ukrainienne. Depuis Bologne, il raconte cette invasion au travers des témoignages et des récits, notamment, des personnes qu'il a eu au téléphone. L'incompréhension, la peur, la fuite pour celles et ceux qui le peuvent, la faim etc.

La structure de l'album alterne récits de l'invasion et retours en arrière, années 1990, 2008, puis 2014 pour évoquer la Tchétchénie martyrisée, l'invasion de la Géorgie, puis de la Crimée et du Donbass. Il revient aussi sur l'Holodomor (la famine organisée par Staline qui fit entre 4 et 6 millions de mort en Ukraine - et il fit la même chose au Kazakhstan, à peu près à la même période, dans les années 1930), ou sur Stepan Bandera (chef de l'OUN, qui s'allia au nazis contre les soviétiques).

Les témoignages parlent évidemment de Boucha, du massacre du théâtre de Marioupol où se trouvaient des centaines de personnes, la violence contre les civils, les meurtres et les viols. Le piano piégé avec une grenade.

Un album très intéressant même si sur quelques aspects j'ai été assez mal à l'aise avec les partis pris de l'auteur : si il est assez équilibré sur le personnage de Bandera, il l'est beaucoup moins sur le régiment Azov, alors qu'il a bien été prouvé (cf. le livre d'A. Colin Lebedev Jamais frères?) que depuis son intégration dans l'armée régulière, il a été quasi totalement dépolitisé (il fut créé par un groupe d'extrême droite); de même, il finit sur l'image du cercueil de Darya Dugina, fille d'Alexandre Dugin, longtemps présenté comme l'éminence grise derrière Poutine, un Raspoutine à la mode néo-nazi, alors qu'en fait il n'en est rien. Pourquoi finir sur cette image, sur cet épisode ? Juste avant, Igort s'adresse à Poutine, et il aurait pu (dû à mon sens) s'arrêter là. Je trouve dommage (même si en soi, l'épiphénomène qu'est le meurtre de Dugina (morte dans une voiture piégée en Russie - son corps était "remarquablement" intact dans le cercueil) dit certaines choses sur la Russie, sur le pouvoir russe et l'instrumentalisation des évènements) de laisser le lecteur refermer l'ouvrage avec la Russie en tête, et pas l'Ukraine.

Je ne suis pas toujours très fan du dessin, même si certains sont très puissants. Sur la forme, on alterne le format "carnet" et les planches plus classiques.

Cet album est vraiment à lire. J'achète rarement des ouvrages (le budget est très serré), mais celui-ci je n'ai pas hésité une seconde. Malgré les bémols que j'ai soulevé, Les cahiers ukrainiens - Journal d'une invasion est une lecture indispensable.

Une participation au mois consacré aux pays de l'Europe de l'Est avec Eva, Patrice et Passage à l'Est.

 

Tag(s) : #Ma bibliothèque, #Ukraine
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