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Délit de gosse, d'Isabel Ascencio, c’est l’histoire d’un couple de femmes. Il y a d’abord Marie, originaire de Maurice, métisse, thésarden c'est notre narratrice. Et il y a Jeanne, jeune réalisatrice de films. De son vrai nom Jeanne-Elise Vaujours du Val. Famille de notable périgourdins très sûrs de soi, qui ne sait rien de rien de la vie de Jeanne à Paris (ils n'ont bien sûr jamais rencontré Marie).
Jeanne a déjà défrayé la chronique quelques années plus tôt, en rompant ses fiançailles avec François-Henri, dit F-H, adoubé par le patriarche, excellente famille, promis à un bel avenir professionnel. Mais il y a un mais : l’homme n’entend rien à Almodovar et la Movida. Et pour Jeanne c’est rédhibitoire. Elle plaque donc l’homme et part en Espagne suivre un réalisateur célèbre et y rencontre Marie .
Et comme son titre l'indique, Délit de gosse est l'histoire de ce couple qui veut avoir un enfant. Mais pas question de PMA pour Jeanne. Pour elle, rien ne vaut la bonne vieille méthode. Et c’est à l’occasion du mariage de son petit frère Ernest, dont F-H est le témoin qu’elle exécutera un "braquage de gamètes". F-H vous l'avez compris sera la "victime". Après tout, on connaît son pedigree et pourquoi ne voudrait-il pas coucher à nouveau avec Jeanne?
Délit de gosse, c’est l’histoire de ce hold-up, de cette femme qui ment encore et toujours à sa famille car se révéler homosexuelle c’est s’exclure définitivement du cercle familial.
Isabel Ascencio nous emmène dans une quête rocambolesque. Délit de gosse est un roman intelligent sur un couple, mais surtout sur Jeanne, tiraillée entre sa famille et ses aspirations profondes. Isabel Ascencio nous raconte par flashbacks successifs, les vies de Marie et de Jeanne, leurs parcours, leur construction de femmes, homosexuelles qui plus est. De ce point de départ rocambolesque, ce braquage de gamètes, comme elle écrit, elle propose une réflexion sensible et émouvante sur l'émancipation d'une femme, sur des aspirations de vie que certains voudraient absolument maintenir à la marge.
Délit de gosse parle aussi de discrimination. La discrimination qu’il faut combattre, les regards qui jaugent, jugent et condamnent. Et comment la famille peut condamner ou sublimer suivant que l’on partage ou non sa philosophie de vie.
Le roman se termine lors des très grandes manifestations des anti Mariage pour tous en 2013. Une sorte de paroxysme. C’est cinématographique, sur le fond et sur la forme, forcément avec un personnage réalisatrice de films. Isabel Ascencio conte cette histoire un peu comme une quête initiatique, d'une plume nerveuse, sensible et lumineuse. Une jolie lecture.