
Enlèvement dans le milieu des immigrés espagnols
1960, bassin d’arcachon : la fille d’immigrés espagnols, âgée d’à peine 3 ans, est enlevée sur la plage devant la maison familiale. Pas de suspect, personne n’a rien vu. Mais ces gens, qui ne se sont jamais vraiment mêlés à leurs voisins, que ce soit à Bordeaux où ils sont d’abord arrivés, puis là dans le Bassin, sont-ils vraiment coupés de l’Espagne comme ils le prétendent ? Le passé les a-t-il rattrapés ? ou s’agit-il d’une rançon comme pour le fils de la richissime famille Peugeot ?
Années 50, Espagne, Catalogne. Abril est fille de Rouges, de Républicains. Son père souvent parti pour mener la lutte contre la Phalange. L’appartement familial accueille régulièrement des clandestins. Elle raconte sa jeunesse. Puis son drame.
Deux époques qui, vous vous en doutez, vont se télescoper, fatalement.
Immersion au cœur du drame des républicains espagnols
L’enquête sur l’enlèvement de Jane, menée par le commissaire Lassere est complexe, plonge le lecteur dans ces années 50-60 où la guerre 39-45 n’est pas si lointaine, dans l’univers des réfugiés espagnols, entre intégration et perpétuation de la lutte anti-franquiste.
Simone Gélin nous conte une histoire proche de nous, géographiquement et temporellement, et qui pourtant nous est pour beaucoup inconnue. Ou alors si peu. Bien sûr on connaît Guernica, les réfugiés en France, la « fameuse » division Azul, mais pas grand-chose de plus.
L’affaire Jane de Boy nous immerge dans cette époque avec talent. On en apprend plus sur les turpitudes de ce régime dictatorial à nos frontières, sur la place de la femme (poule pondeuse derrière les fourneaux), sur la lutte des opposants à Franco, y compris en France, la complicité active ou passive de la police française et des RG….la collaboration avec les faschos, ça les connaît comme souligne un personnage.
Un polar historique qui se vit intensément
J’avoue avoir dévoré ce roman à fort potentiel émotionnel qui se lit à toute vitesse. L’affaire Jane de Boy m’a beaucoup fait penser au roman de Victor del Arbol, La tristesse du Samouraï, qui a également pour sujet les horreurs du franquisme et ses conséquences à long terme sur les Espagnols. Simone Gélin tisse une intrigue qui ne se dévoile que petit à petit, elle reconstitue de manière convaincante cette période plus troublée que l’on pourrait l’imaginer a priori. Un coup de cœur !
Publié aux éditions Vents Salés
Chroniqué sur France Bleu Toulouse le 8 octobre car il fait partie de la sélection pour le Prix de l'Embouchure du Festival toulousain et international Polars du Sud.
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