Quand on la rencontre, quand on l’écoute parler, de sa voix douce au débit mesuré, Karine Giebel semble anodine. Mais sa prose est loin, très loin de l’être. Dans ce Purgatoire des innocents, un pavé de 600+ pages, Giebel nous plonge dans un huis clos étouffant, horrifique. Jusqu’à environ 200 pages, je me demandais bien pourquoi on disait tant que ses romans étaient très noirs. Par la suite, j’ai compris.
Pour vous « pitcher » rapidement : Raphaël, 15 ans de prison derrière lui, son frère William et deux autres complices doivent trouver une planque après un casse à 30 millions d’euros qui tourne mal, Will ayant pris deux balles. Ils atterrissent dans un petit patelin de l’Indre, et choisissent d’appeler une vétérinaire, Sandra, la séquestrent dans sa maison, bien entendu, pas dans le centre du village mais dans un bois. Son mari est absent. Pour l’instant. Au même moment, deux jeunes ado quelque part en France sont enlevées.
Les pions sont posés, Karine Giebel va pouvoir les déplacer à sa guise, sachez dores et déjà qu’il n’y a pour ainsi dire que des noirs sur ce plateau d'échecs. Les blancs sont largement sous représentés dans cette terrible partie qui nous « offre » ce que l’être humain peut faire de pire. On dira que je suis un cœur de pierre, mais ces scènes ne m’ont pas vraiment touchée. J’étais prise par le rythme et si j’ai ressenti l’angoisse, le stress, la lecture ne m’a pas été insoutenable, comme pour d'autres lectrices/lecteurs. Le filtre de la fiction m’a sauvegardée en quelque sorte. Si j’avais entendu parler de cela à la télévision, dans le journal de 20h, ma réaction n’aurait pas du tout été la même (je dis ça, au cas où vous seriez à deux doigts de quitter ces pages, en vous disant que je suis une psychopathe moi aussi !). Ce sont finalement les toutes dernières lignes qui m’ont vraiment émue. Parce qu’en effet, n’attendez pas une fin de bleuette sentimentale. Ce n’est pas tout à fait le style de Karine Giebel.
La grande force du roman, au-delà de son aspect glauque, c'est que l'auteure ne fait pas dans le noir et blanc, mais bien dans les nuances de gris. Très très gris. Elle explore l'âme humaine, et ce qu'on y trouve n'est pas bien beau. Mais il y a aussi des moments d'espoirs, des actes qui viennent apporter un peu de lumière dans toute cette noirceur.
Un roman donc noir, glauque, infernal. Un véritable page-turner comme aiment à dire nos amis anglophones qui m’a tenue en haleine de bout en bout ! A réserver à ceux qui supportent Caryl Férey et consorts.
L'avis d'ALaure (très touchée, on ne l'y reprendra plus!), celui d'Alex (qui a aimé)
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